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Transport des animaux : La Commission européenne propose une révision timide et décevante

Attendue depuis plusieurs mois, la proposition de révision de la réglementation sur le transport des animaux était présentée ce matin par la Commission européenne. Ces dernières années, les investigations menées en France, sur les routes européennes mais également au-delà des frontières, ont révélé de nombreuses défaillances dans le transport des animaux, l’incapacité de la réglementation à protéger efficacement les animaux et donc la nécessité impérieuse de mettre à jour les normes européennes avec les connaissances scientifiques actuelles pour réduire la souffrance animale.

En 2020, la Commission européenne avait en effet annoncé son ambition de rehausser le niveau de bien-être animal au sein de l’UE et de mettre à jour la législation relative à la protection des animaux dans les élevages et lors des transports. La Commission ayant récemment annoncé le report de la révision de la réglementation sur l’élevage des animaux, tous les espoirs reposaient alors sur une proposition ambitieuse de la Commission pour la mise à jour des règles en matière de transport des animaux. Et malheureusement, c’est un pétard mouillé : la proposition de la commission est bien loin d’être à la hauteur des enjeux et des attentes des citoyens européens en matière de protection animale!

Car si la proposition de la Commission européenne contient quelques améliorations par rapport à la réglementation actuelle (règlement CE n°1/2005 du 22 décembre 2004), elle passe à côté d’évolutions indispensables à l’amélioration de la condition animale, dont l’interdiction des exportations d’animaux vivants hors de l’Union européenne fait incontestablement partie ! Le lobbying de certains Etats membres, France en chef de file, n’y est pas pour rien : en effet, alors que certains Etats, comme l’Allemagne, les Pays-Bas ou encore le Luxembourg, plaident activement pour que cesse le calvaire de millions d’animaux exportés chaque année, la France, aux côtés du Portugal, de la Roumanie, l’Irlande ou encore de la Lettonie, fait barrage à toute avancée en la matière. Une influence qui aura eu raison des ambitions progressistes de la Commission européenne, fortement appuyées par les avis scientifiques rendus ces dernières années en faveur de la fin des exportations d’animaux, ambitions tuées dans l’œuf par une opposition persistante d’Etats incapables de faire évoluer leurs pratiques commerciales pour répondre à des impératifs éthiques et écologiques.

Quelques avancées à noter

Parmi les mesures progressistes proposées par la Commission européenne, on notera cependant :

  • L’interdiction du transport maritime d’animaux sur des navires battant « pavillon noir » (navires figurant sur la “liste noire” du Mémorandum de Paris, représentant actuellement 55 % de la flotte de transport de bétail agréée par l’UE), ce qui devrait déjà être la cas tant ces navires représentent un danger manifeste aussi bien pour les animaux que pour l’environnement…
  • L’interdiction des transports d’animaux de plus de 9h lorsqu’ils sont destinés à l’abattage,
  • La réduction des temps de transport maximum pour la plupart des espèces, mais malheureusement encore bien trop longs pour assurer une bonne protection des animaux (21h voire même 24h pour les lapins…),
  • La mise à jour des exigences en termes d’espace disponible pour les animaux dans les moyens de transport,
  • La traçabilité obligatoire en temps réel de tous les voyages routiers et l’enregistrement des données pertinentes à des fins de contrôle,
  • L’âge minimum de 5 semaines pour le transport des veaux non sevrés,
  • Le champ d’application de la réglementation étendu aux animaux aquatiques : un acte délégué sera nécessaire pour introduire des exigences mesurables et spécifiques aux espèces, encore faudra-t-il qu’il soit suffisamment exigeant pour satisfaire l’objectif de mieux protéger les animaux…

Des propositions clairement insuffisantes

L’inquiétude porte cependant sur la disparition, dans la proposition de la Commission, de certaines normes de protection des animaux, telles que l’obligation de planifier les transports les plus courts possibles, ainsi que sur l’absence d’interdiction de nombre de pratiques fortement préjudiciables et reconnues comme des sources de stress et de souffrance pour les animaux.

En effet, la proposition de la Commission européenne ne contient aucune exigence concernant le transport des animaux en fin de carrière (animaux de réforme) ou des femelles gestantes, pourtant reconnus comme des animaux vulnérables. Par ailleurs, la pratique consistant à transporter des animaux non sevrés dans des camions partiellement acheminés par bateau reste autorisée, sans obligation de reposer les animaux après une longue traversée. Autre sujet de préoccupation : la Commission européenne n’interdit pas les transports en cas de températures extrêmes mais les soumet simplement à de nouvelles conditions de durées et d’horaires. Ces précautions sont clairement insuffisantes pour assurer une bonne protection des animaux, d’autant que la Commission supprime par la même occasion les exigences en termes de températures minimales et maximales autorisées à l’intérieur des véhicules et que les contrôles à travers l’Europe et au-delà seront quasiment impossibles.

Une attente sociétale forte mais peu entendue

En matière de transport d’animaux, l’attente citoyenne est forte : en effet, l’eurobaromètre 2023 de la commission européenne –  Attitudes des européens à l’égard du bien-être animal, publié en octobre 2023, révélait que 83% des Européens souhaitent que la durée du transport des animaux vivants à des « fins commerciales » dans ou en provenance de l’UE soit réduite (85% des français). Une attente qui ressort également du sondage IFOP réalisé pour la Fondation Brigitte Bardot en mars 2023, selon lequel 87% des Français sont favorables à une limitation de la durée de transports d’animaux vivants à un maximum de huit heures pour les mammifères et à 4 heures pour les volailles et lapins. Selon le même sondage, 80% des Français se disaient favorables à l’interdiction de l’exportation d’animaux d’élevage vivants hors de l’Union Européenne, au profit de l’élevage et l’abattage sur le territoire européen.

La Commission européenne a reconnu, dans son bilan de qualité rendu public en octobre 2022, que la réglementation actuelle est mal appliquée et obsolète. Elle concluait son audit ainsi : « les règles actuelles ne tiennent pas pleinement compte des attentes croissantes de la société et des préoccupations éthiques, des évolutions scientifiques et technologiques et des défis futurs en matière de durabilité. Par conséquent, la législation actuelle de l’UE sur le bien-être animal n’est pas totalement apte à répondre aux besoins actuels et futurs ».

« Avec cette inquiétante proposition de révision, la Commission européenne prouve une fois encore qu’elle répond davantage aux pressions politiques et de l’agro-industrie qu’aux enjeux qu’elle a elle-même identifiés. Après avoir trahi son engagement à interdire l’élevage en cages pour 2027, elle passe à côté d’une opportunité rare d’opérer de réels changements pour la condition animale, attendus et nécessaires pour assurer la durabilité de la production européenne. A ce train-là, l’Union européenne est encore loin de montrer l’exemple de la bientraitance animale sur la scène internationale ! » déplore Christophe Marie, Directeur adjoint et Porte-parole de la Fondation Brigitte bardot.

Crédit © We Animals Media

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